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mercredi 19 novembre 2025

LA RECETTE ZUCMAN

Ils en ont parlé à l'assemblée, le coté gauche en a rêvé, le coté droite l'a combattue, le centre l'a boudée, les lobbying sont puissants, les autres se sont positionné pour appuyer ou contrer les uns. Bref la taxe Zucman n'est pas passée pas même la version allégée.

En parlant avec les uns et les autres, je me suis rendu compte que je (que nous) parlions de choses sans vraiment les comprendre; Zucman ? Et si la recette était bonne ? J'ai voulu en savoir plus et j'ai décortiqué un peu son petit fascicule, si court (une trentaine de pages !) que je ne sais pas en fait si cela en valait la peine pour vous. Pour moi oui. Alors je partage ce que j'ai pioché.

(Les milliardaires ne paient pas d'impôt sur le revenu et nous allons y mettre fin. Gabriel Zucman, 60 pages. Aux éditions Seuil.

 J'ai pris l'essentiel (à mon opinion) de chaque chapitre.

  • Dissiper l’opacité : un projet de recherche international

Les chiffres qui suivent prélevés dans le 1er chapitre, sont issus d 'études de chercheurs dont les qualifications ne permettent à mon avis aucune contestation.

"la puissance publique prélève entre 30 % et 50 % du revenu national en impôts et cotisations sociales."

"Sur les 2 440 milliards d’euros de revenu national en 2024, la puissance publique a prélevé 1 250 milliards d’euros en cotisations sociales, taxe sur la valeur ajoutée (TVA), impôt sur le revenu et sur les sociétés, taxe foncière, et autres impôts divers et variés. Soit un taux de prélèvement obligatoire de 51 %"

"Qu’on en juge : si tous nos milliardaires partaient demain s’installer aux îles Caïmans, la perte de recettes fiscales pour le Trésor public hexagonal serait infime, de l’ordre de 0,03 %."

  • Le taux de prélèvement obligatoire du Français moyen : 51 %

Sur les 2 440 milliards d’euros de revenu national en 2024, la puissance publique a prélevé 1 250 milliards d’euros en cotisations sociales, taxe sur la valeur ajoutée (TVA), impôt sur le revenu et sur les sociétés, taxe foncière, et autres impôts divers et variés. Soit un taux de prélèvement obligatoire de 51 %

(Revenu national = l’ensemble des revenus touchés par les personnes résidant en France, quelle que soit leur nature : salaires, intérêts, loyers, revenus d’indépendants et bénéfices d’entreprises, que ces derniers soient distribués ou réinvestis)

  • Toutes les catégories sociales paient beaucoup d’impôts

" l’Insee publie en effet depuis 2019 une estimation officielle du taux de prélèvement obligatoire des différents groupes de revenus (à l’exclusion des ultra-riches)"

D'où Zucman nous annonce une répartition en trois catégories de classes,

Classes populaires  taux de prélèvement 45%
Classes moyennes  taux de prélèvement 50 %
Classes aisées  taux de prélèvement qui dépasse les 50 %

nous prévenant bien que ce sont des taux moyens : " Tout le monde ne paie pas 45 % d’impôt au sein des classes populaires, par exemple."

Il entame ensuite une correction de ces taux par le fait que chaque classe perçoit des aides, les populaires en premier : " allocations logement, revenu de solidarité active, allocations familiales, prime d’activité, etc"

D'où un nouvel ajustement où les Classes populaires ont un taux de prélèvement tombant à 30 % , celui des Classes moyennes  à 46 %.

Constat : "toutes les grandes catégories sociales paient beaucoup d’impôts en France."

Mais là il ne parle pas du taux des ultrariches qui est le sujet du prochain chapitre :

  • Le taux effectif des milliardaires en France : 13 %

Dans ce petit chapitre, Zucman nous explique le chemin pour arriver à ce taux de 13 %. L'INSEE ne donnant les chiffres que pour les autres classes, les calculs ont été faits par des chercheurs universitaires "Car des économistes ont pris le relais là où la statistique publique s’arrête, au prix d’un travail titanesque. En France, ce sont quatre chercheurs de l’Institut des politiques publiques (IPP).."

La conclusion est que le taux de prélèvement obligatoire des milliardaires est de 25 % mais comme ce sont des sociétés internationalisées, ceux-ci paient une partie (12 %) à l'étranger; il reste donc un taux de 13% pour la France.

  • L’impôt sur le revenu : une révolution inachevée

Là, Zucman nous explique pourquoi les milliardaires échappent à l'impôt.

Pour faire simple, j'ai comprimé le paragraphe au maximum:

- les milliardaires français se sont acquittés de 2 % à peine de leurs revenus et de l’ordre de 0,1 % de leurs patrimoines ce qui représente 0,03 % des recettes fiscales de la France.

- Les milliardaires tirent leurs richesses des sociétés qu’ils possèdent. Les actions de ces entreprises constituent plus de 90 % de leur fortune et leurs bénéfices plus de 90 % de leur revenu.

- Pour échapper à l'impôt, ces revenus sont déposés dans des holdings où ils seront, calculs faits, imposés à 1,25 %.

L'exemple est très parlant:

"Concrètement, un magnat de l’industrie du luxe peut recevoir 3 milliards d’euros de dividendes en quasi-franchise d’impôt. Là où l’actionnaire lambda devra s’acquitter d’un impôt forfaitaire (« flat tax ») de 30 %, le milliardaire paiera 1,25 %."

Il conclut ainsi:

Plus d’un siècle après sa création...l’impôt sur le revenu demeure une révolution inachevée : les milliardaires n’y sont pas encore entrés.

  • Une injustice fondamentale

Ce chapitre est difficile à résumer, tout y est important et je ne suis pas très heureux de faire un choix.

"Pourquoi est-ce un problème ? Dit simplement, parce qu’il s’agit là d’une violation fondamentale du principe d’égalité devant l’impôt, qui se trouve depuis la Révolution française au cœur de notre contrat social. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 pose en effet le principe de l’égalité devant les charges publiques dans son article 13."

Evolution de la fortune des ultrariches:

En 1996 : 6 % du PIB

En 2010 : 12 %

En 2024 : 42 % !!!!

42 % qui s'ils étaient imposés rapporterait env. 0,8 % du PIB soit env. 20 milliards: à vous de juger.

Il pose une question qui interpelle :

"Quand faudra-t-il que cette dynamique explosive cesse avant qu’elle ne finisse par miner définitivement nos idéaux démocratiques ? Quand la fortune des ultra-riches aura dépassé 50 % du PIB ? 100 % ? 200 % ? Quand ces derniers posséderont non pas 80 % des médias privés mais les détiendront tous ? Ou bien faudra-t-il attendre qu’ils acquièrent également ceux qui aujourd’hui appartiennent encore à la sphère publique ? Qu’ils possèdent non seulement des rues entières de Paris, mais encore des quartiers ou peut-être demain des arrondissements tout entiers ?"

Après passés deux chapitres dont le titre résume bien le contenu:

  • Oui, les milliardaires sont bel et bien sous-imposés
  • Le monde, un paradis fiscal pour milliardaires

On en vient à la proposition de Zucman :

  • L’impôt plancher : l’outil le plus puissant pour faire payer les milliardaires

Le principe : Pour une personne immensément fortunée, l’imposition personnelle ne devrait pas pouvoir tomber en dessous d’un plancher incompressible.

La proposition : Une imposition personnelle minimum fixée à 2 % du patrimoine, et que les « personnes immensément fortunées » soient définies comme celles dont la richesse s’élève à 100 millions de dollars ou plus.

"J’estimais qu’une telle mesure pourrait rapporter entre 300 et 380 milliards de dollars chaque année à l’échelle planétaire – 67 milliards d’euros au niveau européen, d’après les calculs réalisés avec mes collègues de l’Observatoire européen de la fiscalité".

Si cette proposition avait été adoptée elle aurait pu générer env. 20 milliards d’euros par an. Mais pourquoi ce seuil de 100 millions pour cette imposition ? Zucman l'explique plus loin:

" Les contribuables dont la fortune approche les 100 millions tendent à s’acquitter déjà de montants significatifs d’impôt sur le revenu ; ils seraient ainsi relativement peu concernés par le dispositif que je propose, ce qui permet de limiter les effets de seuil. Plus de 80 % des recettes de l’impôt plancher proviendraient des milliardaires – là où la richesse se concentre et les revenus s’évanouissent."

  • Un mécanisme efficace

Se fondant sur le patrimoine et non sur le revenu, l’impôt plancher sur les ultra-riches, permet de contourner "les formes possibles d’optimisation fiscale, qu’elles passent par des holdings, des trusts, des sociétés écran ou des conglomérats eux-mêmes."

Ecueil à surmonter :l’exil fiscal.

Zucman propose ceci, à l'instar des USA, dont les ressortissants paient leurs impôts quelque soit le pays où ils vivent :

"les contribuables (exilés) concernés par l’impôt plancher continueraient à y être soumis pendant 5 ans après un départ, seuil que l’on pourrait porter à 10 ans. On pourrait également imaginer que l’impôt s’efface progressivement au cours du temps : une personne ayant vécu 50 ans en France continuerait à y payer une fraction…"

Pas con. (oh pardon !)

  • Faire entrer les milliardaires dans la solidarité nationale.

Dernier chapitre. dont je ne reprendrais que quelques mots.

"L’impôt plancher constituerait bien sûr une petite innovation dans l’organisation de la solidarité nationale, et on peut comprendre que les personnes concernées s’y opposent avec toutes les armes à leur disposition. La création de l’impôt sur le revenu, elle aussi, suscita en son temps l’ire des grandes fortunes, et Joseph Caillaux, qui n’avait rien d’un révolutionnaire, fit face à des attaques d’une violence inouïe….Pierre angulaire de la fiscalité moderne, il contribua au développement de l’État social, le moteur de la croissance économique contemporaine. En dépit de ses lacunes, personne aujourd’hui ou presque ne le remet en cause. Comme son illustre prédécesseur qu’il ne fait que parachever, l’impôt plancher sur les ultra-riches finira lui aussi par s’imposer pour ce qu’il est : une évidence."

Et puis même s'ils partaient ? tous ? ils ne représentent actuellement que 0,03 % des recettes fiscales de la France. S' ils se dégageaient de leurs investissements en France ? Les actions, obligations, par exemple, qu'ils vendraient seraient de toutes façon acquises par d'autres acheteurs et selon la "mécanique" proposée par l'auteur, il n'y aurait pas d'incidence sur les entreprises concernées.

La taxe Zucman a été débattue, acceptée à l'assemblée, puis refusée au sénat, écartée sous le gouvernement Bayrou,plus récemment reproposée pour finir par être remplacée par une transformation de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive sans qu'il y ait une étude sérieuse sur son efficacité, certains parlant même d'un rendement inférieur à l'IFI actuel ! Et qui de plus, ne cible plus les ultrariches mais passe de quelques 1800 personnes contribuables (dont la fortune est sup à 100 millions) à 180 000.

Merci Mr Zucman pour cet éclairage. (Les milliardaires ne paient pas d'impôt sur le revenu et nous allons y mettre fin. Gabriel Zucman, 60 pages. Aux éditions Seuil.)


À + !

Comme toujours l'écriture en italique et de cette couleur indique la retranscription d'un cartel, d'une explication donnée près de l'œuvre ou bien d'un extrait de livre d'un auteur mais certainement pas de moi.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Gabriel_Zucman
https://gabriel-zucman.eu/
https://www.lecontemporain.net/search?q=zucman
https://www.franceinfo.fr/economie/budget/budget-2026-le-gouvernement-s-oppose-a-la-taxe-zucman-craignant-une-fuite-des-ultra-riches_7380325.html
https://www.doc-du-juriste.com/blog/actualites-droit/rejet-taxe-zucman-assemblee-nationale-06-11-2025.html

mercredi 10 septembre 2025

SPY x FAMILY, LE PLAISIR DU MANGA.

 Scrutant le pc par dessus mon épaule, (aimanté à tout ce qui est écran comme tous ceux de son âge), mon petit-fils (12 ans) m'interroge : Qu'est-ce que tu fais Papi ? 

Lui ayant expliqué succinctement ce qu'est un blog, (patient, il écoute mais il connait déjà...) je lui propose d'écrire un article à quatre mains. Le thème choisi est le manga japonais Spy x Family, j'avoue que je suis très intéressé par celui-ci car il me plait beaucoup. Oui. Je suis resté un peu minot.

Dans Spy x Family qu'y a t-il ? De la bagarre, il en faut mais très peu sanglante, moins de violence que dans Naruto ou Boruto. 

Tatsuya Endō, l'auteur, est un mangaka japonais reconnu, déjà deux de ses mangas ont été adaptés en France: Tista et The Moon Sword 

Spy x Family s'adresse à des jeunes à partir de 11, 12 ans, les dessins de Tatsuya Endô sont particulièrement  soignés, les personnages attachants, beaucoup d'humour dans cette intrigue d’espionnage familiale.


Une histoire captivante. 
Il y a un but clair et précis (et non une vague aspiration comme dans One Piece à devenir le roi des pirates, enfin ça c'est mon opinion de vieux ...) 
Et l'histoire évolue par étapes. 
Et très humaine, ok on se bat, mais pas trop de combats, un scénario assez assez proche de nous. Beaucoup plus proche que peut l'être One Piece par exemple
.
- Charly, à toi. Que raconte ce manga ? 

- Spy x Family explique l'histoire d'un espion du nom de Loid Forger (nom de code Twilight) dans un monde divisé en deux pays rivaux : 
Ostania et  Westalis 

- On comprend tout de suite que Ostania est inspiré de l’Allemagne de l’Est pendant la guerre froide tandis que Westalis elle est inspirée de l’Allemagne de l’Ouest. Twilight travaille de quel coté ?

- Pour les Services Secrets de Westalis qui sont dirigés par une personne du nom de Wise. Les deux nations sont en conflit constant, et les services secrets de chaque côté mènent des opérations d’espionnage. 

- Super intéressant et ça commence comment cette histoire ?

- Un jour dans un train Twilight reçoit une mission : surveiller Donovan Desmond, un chef politique influent, en s'infiltrant dans une école prestigieuse, l'Eden Academy, afin d'empêcher une crise politique. Il a une semaine pour  crée une famille ce qui est une couverture obligatoire pour entrer dans cette prestigieuse école.
Donovan Desmond complote un projet contre la nation.

 - Ok super et cette famille, elle se compose de qui ?

- Il y a Loid Forger (alias Twilight) : Un espion de Westalis, connu pour ses missions secrètes. Sa couverture et médecin et père de famille .

Il y a sa fausse épouse Yor Forger (alias Princesse Ibara) : Une tueuse à gages redoutable, qui cherche à mener une vie normale en consolidant sa couverture qui est secrétaire de mairie.

Et le meilleur pour la fin Anya Forger : leur petite fille ( adoptée ) télépathe, issue d’un laboratoire secret. Elle peut lire dans les pensées des gens, mais garde ce pouvoir secret. Elle est la seule à connaitre les vraies fonctions de ses parents.


- Par la suite un nouveau membre de cette fausse famille sera introduit mais ça je vous laisse le découvrir.

- Ce manga est très intéressant ! Il y a de l'humour, de l'action, la coexistence des missions secrètes et des relations familiales amènent du suspense. On ne se lasse pas. Je te laisse le mot de la fin Charly.


- Si ce résumé vous a plu n'hésitez pas à le lire ce manga, 14 tomes sont sortis et 15 au japon 
Merci d'avoir lu ce blog dites vos avis dans les commentaires et comment m'améliorer.
Merci à la prochaine. Signé Charly.


- C'est noté Charly. A + !

samedi 30 août 2025

DECLARATION CUBIQUE (RE)

 

Re Déclaration cubique

30 Août 2025

Cubes posés les uns sur les autres
Empilement pareil à une tour
Les premiers s'ajustent facilement 
 Rien ne bouge c'est stable

De nouveaux cubes arrivent

La construction s’élève
Vents et vibrations l'affectent 
Mais l'empilement résiste

Les cubes continuent à se poser.

La tour tient.
Et à 45 cubes empilés,
On peut l'affirmer Inexpugnable.
Elle l'est
*



mercredi 16 juillet 2025

PAUSE

 
"Si une ville trépide, fulmine, présente chaque matin un nouveau visage, programme sans cesse des activités culturelles, si tour à tour elle se barricade puis se rend, puis reprend l'étendard de la révolte , vous n'échapperez pas à la surcharge d'évènements et vous y prendrez goût. Vous oublierez le temps délicieux où rien ne se passait, sinon une durée pure - pure parce que rien ne la troublait. Vous méconnaitrez peu à peu ce que veut dire pureté, poésie pure (à la limite du silence), politique pure (à la limite de l'impouvoir) …

Perdant la retenue qui faisait votre charme, quand des jeunes gens en colère défileront, quand des foules se porteront vers une salle de cinéma ou un musée, quand des foules se porteront vers un stade, vous leur crierez : 

"Attendez moi, je suis des vôtres. Je veux brailler avec vous. Je veux piétiner avec vous les parquets d'un musée" Ils vous entendront.

Sur le coup de 3 heures du matin, épuisé et ravi, vous aurez la faiblesse de prononcer "c'est dingue" car vous aurez rejoint la foule innombrable des mal-disants et vous vous sentirez bien au chaud au milieu de phrases convenues en ajoutant des "quelque part", des "revisiter"...
*
Alors il est temps de faire une pause. J'éteins les écrans. On se reparle fin Août ?

*Extrait de "Du Bon Usage
de la lenteur" de Pierre Sansot.

mercredi 9 juillet 2025

LES TOCARDS DU MI5 DE MICK HERRON

 Parmi les polars, j'apprécie pleinement ceux dit "d'espionnage", c'est un plaisir d'enfant qui persiste en moi certainement : le rêve d'être un espion !  Je me régale trop.

Et si par la suite, la découverte de John Le Carré a entretenu le feu, celui-ci brûlotait chichement. 

Ainsi lorsque ma fille m'a offert les deux premiers romans de Mick Herron, à peine ai-je compris de quoi il retournait que déjà je jubilait :) 

Je n'écris pas de chroniques de littérature, ce qu'il y a de plus chronique chez moi étant ma lenteur, bien sûr, vous trouverez bien quelques bouts de textes d'auteurs maigrement disséminés dans le blog mais pas plus. 
Sauf quand une lecture me régale vraiment. Alors je me surprend à vouloir faire partager mon euphorie au plus grand nombre, m'imaginant certainement que les amateurs de ce genre de romans, ignorants totalement l'existence de Mick Herron et de ses récits d'espionnage, dont, maintenant planant sur mon euphorie devenue béatitude, je regarde comme de saintes évangiles au pays des agents secrets, ont besoin de mon anagogie pour enfin connaître ce divin auteur.

Mick Herron est anglais. Si l'on regarde son wiki, on voit que ses livres ne sont pas très nombreux mais de qualité : les nominations à des prix littéraires sont aussi nombreuses. Mais hélas, seulement quatre sont traduits en français.

Alors bien sûr, vous pouvez passer la case lecture et aller directement à la case Série car oui il y a la série tirée de ces romans et qui cartonne, assez réussie d'après ma fille. 

Voici les livres en question:

La Maison Des Tocards. Le premier à lire impérativement avant les deux autres. La Maison Des Tocards , c'est un peu  la poubelle des services secrets britanniques, mais une poubelle qu'on ne veut pas vider, on garde les déchets: des agents qui ont merdouillé, qu'on ne peut donc plus leur confier des vraies missions de renseignement et qu'on ne veut pas forcément jeter dans la nature. Jackson Lamb en est le chef et franchement, il est à la hauteur de sa tâche et je dirais même de ses taches...vous comprendrez pourquoi si vous ouvrez le livre. Trois choses écrites avec brio: le scénario, l'action et l'humour.

Dans ce premier tome, l'accent est mis sur un de ces agents placardisés River Cartwright, dernier arrivé qui doit comme les autres se plier à n'effectuer que du travail administratif répétitif, sauf que. Et oui ! Sauf qu' une vidéo diffusée sur Internet montre un otage menacé d'exécution et pensant à se racheter, River Cartwright décide, à l'aide de ses compagnons d'infortune, de sauver cet homme.

Avec mes quelques neurones, j'avoue ne pas avoir retenu tous les noms des tocards de suite, j'ai du mal avec ces noms anglais: j'ai dû me faire une petite liste mais à part ça, j'ai dévoré ce premier tome à pleines dents !

Les Lions Sont Morts (Prix Gold Dagger de la Crime Writers’ Association, élu polar de l’année 2013 par le Times). Sur ce deuxième tome, on gagne du temps: les personnages nous ont déjà été présentés. La mort de Dickie Bowe, ancien espion à l'époque de la guerre froide dans un bus de Londres, ne semble pas naturelle à Jackson Lamb qui connaissait bien Dickie, ils étaient en poste en Allemagne de l’Est au même moment. Lamb mène sa propre enquête  et récupère son portable qui lui révèle une magouille d'agents russes sur le point d'être mise en œuvre...Les Tocards relégués à des tâches de bureau sautent à pieds joints sur une mission qui s'avère bien délicate.

Tellement emballé par, primo, le fait que ce bouquin eut un prix et que deuxio, j'étais tellement emballé par le premier tome que le démarrage m'a paru un peu long mais la suite ne m'a pas déçue. Là comme dans La Maison Des Tocards, l'enquête est bien ficelée, l'humour plus ou moins fin de chaque personnage m'a bien plu. Et également de l'action, du suspense; un régal.

Et le troisième:


Mission Tigre. Les deux premiers romans m'ayant donné faim, j'ai attaqué Opération Tigre sans attacher ma serviette autour du cou, tant pis. Et j'ai bien fait: je n'en ai fait qu'une bouchée. Le chapitre 1 débute ainsi: Comme souvent en cas de corruption, l'histoire commença avec des mecs en costume. Une des agents du Placard est enlevée et séquestrée. On doit la libérer contre une drôle de rançon. Les caractères de chaque personnage sont bien affirmés, pas un d'entre eux ne nous est indifférent, alors quand on en perd un... (ou pas ?)

Ayant lu ce troisième tome comme on mange son dessert préféré, et bien, à la fin, j'ai la même sensation de manque: déjà fini ! il était trop petit ! Attention ! Mick Herron est addictif.

Voilà c'est tout.

Il y a bien un quatrième polar toujours dans la même veine avec le MI5 comme cadre et les même dirigeants, mais la section des Tocards n'est pas de la partie. Plus noir que les trois précédents, très peu d'humour, c'est quand même un très bon roman policier: Agent Hostile.

Sinon, pour les non-lisants, il y a la série : Slow Horses. Mais c'est dommage.

A + !

mercredi 2 juillet 2025

VISITE DE TROIS LACS D'ITALIE. LAGO DI COMO. IL SECONDO GIORNO.

 Il secondo giorno, le programme établi était la visite de la Villa Carlotta puis celle de Monastero à Varenne. 

Nous commençons par la Villa Carlotta située pas très loin de notre hôtel, à Tremezzo, si vous avez suivi un peu la géographie des lieux sur "il primo giorno", là, vous savez déjà que les villages de Lenno et Tremezzo sont voisins.

Bref tout ça pour dire qu'on allait profiter d'une petite promenade en bateau et ça j'aime bien. Nous embarquons au Quai "Campo". Passée la Villa La Cassinella, on aperçoit la Villa Balbaniello au bout du cap.


La voici de l'autre coté.
 
Mezzegra dépassé, nous arrivons déjà à Tremezzo avec sa très reconnaissable église de San Lorenzo.

Puis le Grand Hôtel de Tremezzo

Et c'est juste après que nous descendons, au quai "Villa Carlotti, bien avant Grianta. 
Ah ! Grianta ! Nous aurions bien poussé jusqu'au château de Grianta, dont mon auteur préféré - pour ces voyages en Italie - nous a si joliment décrit dans sa "Chartreuse de Parme".  Nous sommes au début du livre lorsque le marquis Del Dongo regagne son château de Grianta. 

"Ce château, situé dans une position peut-être unique au monde, sur un plateau à cent cinquante pieds au-dessus de ce lac sublime dont il domine une grande partie, avait été une place forte. La famille del Dongo le fit construire au quinzième siècle, comme le témoignaient de toutes parts les marbres chargés de ses armes ; on y voyait encore des ponts-levis et des fossés profonds, à la vérité privés d'eau; mais avec ces murs de quatre-vingt pieds de haut et de six pieds d'épaisseur, ce château était à l'abri d'un coup de main;... 

Cette belle description ne pouvait que nous inciter à le visiter. Et puis il y a aussi la belle comtesse Pietranera qui nous en remet une couche un peu plus loin, veuve et ruinée, elle est conviée par son frère le marquis Del Dongo de séjourner au château:

La Villa Melzi vue de la Villa Carlotta.
"Je ne sais si elle se trompait, mais ce qu'il y a de sûr c'est que cette âme passionnée, qui venait de refuser si lestement l'offre de deux immenses fortunes, apporta le bonheur au château de Grianta. Ses
deux nièces étaient folles de joie. Tu m'as rendu les beaux jours de la jeunesse, lui disait la marquise en l'embrassant; la veille de ton arrivée, j'avais cent ans. La comtesse se mit à revoir, avec Fabrice, tous ces lieux enchanteurs voisins de Grianta, et si célébrés par les voyageurs : la villa Melzi de l'autre côté du lac, vis-à-vis le château, et qui lui sert de point de vue; au-dessus le bois sacré des Sfondrata, et le hardi promontoire qui sépare les deux branches du lac, celle de Côme, si voluptueuse, et celle qui court vers Lecco, pleine de sévérité: aspects sublimes et gracieux, que le site le plus renommé du monde, la baie de Naples, égale, mais ne surpasse point."

Bien que la prose captivante de Stendhal nous donne une irrésistible envie de visiter ce château dit cinq fois centenaire, et que la comtesse atteste de la beauté des paysages qui l'entourent, il est malheureusement avéré que ce château n'a jamais existé.
Bon. 
Ceci dit.
Oublions le Château des Del Dongo et
Revenons à notre Villa Carlotta !

Avant l'entrée, un panneau nous explique bien des choses que je n'aurais pas à rechercher dans google, vous n'êtes pas obligés de le lire, sauf si l'Histoire vous démange un peu.

Notes historiques.  La villa fut construite à la fin du XVIIe siècle par le marquis Giorgio Clerici II et, comme l'illustrent les gravures de Marcantonio Dal Re, elle était alors entourée d'un grand jardin à l'italienne agrémenté de statues, de fontaines et de terrasses descendant vers le lac. La propriété fut vendue en 1801 à Gian Battista Sommariva, président du Comité de gouvernement de la République cisalpine et collectionneur d'art. Ce dernier lui remit un aspect nouveau en retirant le mobilier et les décorations du XVIIIe siècle pour y placer une partie de sa précieuse collection d'œuvres d'art. Ces chefs-d'œuvre rendirent la villa célèbre dans toute l'Europe et attirèrent des visiteurs illustres tels que Stendhal, Flaubert et Lady Morgan. En 1843, la propriété fut achetée par la princesse Marianne de Nassau et, en 1847, offerte à sa fille Carlotta, à qui l'on doit le nom actuel de la villa, à l'occasion de son mariage avec le grand-duc Georges de Saxe-Meiningen. Les nouveaux propriétaires ajoutèrent des décorations aux motifs néo-Renaissance et pompéiens, réalisées par des artistes allemands et italiens, dont Ludovico Pogliaghi, et embellirent le jardin en y introduisant de nouvelles espèces telles que des rhododendrons, des azalées, des camélias, des fougères et des palmiers. Depuis 1927, la propriété appartient à l'État italien et est gérée par une association à but non lucratif.
Description
La villa se compose d'un bâtiment de trois étages en plan en « C » avec une façade marquée par de simples pilastres. Dans la partie centrale, deux fenêtres centrales soulignent l'entrée principale et le rez-de-chaussée. Le jardin à l'italienne devant la villa a conservé son plan d'origine et possède une balustrade en pierre ornée de figures allégoriques et une fontaine avec une statue d'Arion de Méthymne.
Les salles du rez-de-chaussée, décorées dans un style néoclassique, sont consacrées à l'exposition de la collection d'art. Dans le hall central, un bas-relief représentant l'Entrée d'Alexandre le Grand à Babylone, œuvre du sculpteur danois Bertel Thorvaldsen, est exposé. D'autres œuvres sont également exposées au rez-de-chaussée : la statue de Terpsichore d'Antonio Canova, le Palamède du même Canova, le célèbre groupe d'Éros et Psyché d'Adamo Tadolini, le tableau de Virgile lisant le sixième chant de l'Énéide du peintre français Jean-Baptiste Wicar et les Derniers adieux de Roméo et Juliette de Francesco Hayez. Les salles du premier étage conservent un mobilier ancien et des plafonds en bois décorés du XVIIIe siècle. Autour de la villa s'étend un grand parc réputé pour ses extraordinaires rhododendrons et azalées à floraison printanière. Ses collections botaniques et ses paysages font du jardin une destination incontournable tout au long de l'année.

Vous avez tout lu ? Bravo ! Vous n'avez rien lu ? Pas grave, de toute façon je vais vous en toucher quelques mots avec ces photos ci-dessous.

C'est le marquis George II Clerici, en 1795 qui fit construire la villa, 
celle-ci s'appelle tout naturellement Villa Clerici, puis change de famille en 1801, achetée par Gian Battista Sommariva, homme politique et ami proche de Napoléon Bonaparte qui en fera (Sommariva pas Bonaparte) un véritable écrin pour une collection d'art.
La marquise et son époux pris devant leur Villa Clerici mais voulant restés anonymes.




Lorsqu'on a payé le billet à l'accueil, nous arrivons directement dans les jardins devant la villa. 

Ce sont des jardins dits à l'italienne signifiant des allées bien droites, des haies et des topiaires bien taillées, dessins symétriques, et des fontaines, bassins, jets d’eau, souvent ornés de sculptures. 

Ce jardin c'est celui le plus conforme à celui de l'époque de la conception.

La foule s'y prend en photo de tous les côtés, dans l'indifférence totale des tortues aquatiques, nous en profitons pour s'échapper plus loin: vers le jardin botanique.

Ce second jardin que je préfère de loin à celui évoqué supra, est un jardin dit à l'anglaise par son aspect sauvage et abondant : il présente une végétation diversifiée, plus de 150 variétés d'azalées, camélias,  rhododendrons, cèdres et séquoias centenaires, palmiers et autres essences exotiques.

La Villa Clerici est rachetée en 1847 par la princesse Marianne d'Orange-Nassau, épouse du prince Albert de Prusse, qui l'offre à sa fille Charlotte en cadeau de mariage lors de son union avec Georges II, duc de Saxe-Meiningen. La villa a alors été rebaptisée Villa Carlotta en son honneur. 



Hélas, Charlotte n'a pu profiter de la villa que quelques années, car elle est décédée en 1855 à l'âge de 23 ans. Et c'est son époux le duc Georges II, passionné de botanique, et son fils Bernard III qui ont développé et enrichi le jardin.





Bon c'est pas tout ça mais il faut quand même voir l'intérieur.
Comme je vous le disais plus haut, c'est Gian Battista Sommariva qui en fit un musée.

Dès l'entrée, on apprécie la grandeur des pièces, par effet d'espace les statues  exposées (une ou deux par pièce) sont à l'aise malgré leur grande taille, et ne font pas collection "en série" comme on peut le constater au Louvre par exemple où elles sont très proches et alignées.

La salle de marbre présente une frise de marbre de Thorvaldsen représentant l’entrée triomphale d’Alexandre le Grand dans Babylone. Je n'ai pas pris de photo, la vastitude de la pièce rendant dérisoire la vue que je pourrais vous donner, mais voici ici un bel aperçu (clic).

Les salles autour montrent d'autres chefs d'œuvres. Voici "Amour et Psyché". Réplique de la sculpture commandée à Antonio Canova par le prince russe Youssoupoff, l'original est au Musée de l’Ermitage de Saint Pétersbourg, il en existe aussi une réplique + petite au Louvre.
"Un conte de fées toujours d'actualité
Le mythe d'Amour et Psyché, raconté par Apulée dans les Métamorphoses, veut que les deux amants soient contrariés dans la réalisation de leur bonheur par Vénus, la mère jalouse d'Amour. Prête à tout pour retrouver son bien-aimé, Psyché est confrontée à une série d'épreuves, dont la dernière la mène aux enfers à la recherche d'un vase dont le contenu maléfique la conduit à la mort ; puis intervient Amour qui, avec un baiser, la ramène à la vie."


« Cependant la blessure de Cupidon s’était cicatrisée. La force lui était revenue, et avec elle l’impatience de revoir sa Psyché. Il s’échappe à travers l’étroite fenêtre de sa prison. Ses ailes rafraîchies et reposées le transportent en un clin d’œil près de son amante.Il la dégage avec soin du sommeil qui l’oppresse, et qu’il replace dans sa boîte. Puis, de la pointe d’une de ses flèches, il touche légèrement Psyché et la réveille »
Apulée, Métamorphoses, Livre VI


Luigi Bienaimé (1795-1878)
L'Amour abreuvant les colombes
de Vénus (Innocence) 1821-1824
Marbre de Carrare 

A l'étage supérieur, l'escalier débouche sur une très belle fresque murale


Chaque pièce qui est un musée de la décoration et contient l'ameublement des propriétaires, est exposée notamment la chambre de Carlotta.

La salle des camées était très intéressante:

Salle des Camées
Les camées en plâtre exposés dans cette salle font partie d'une collection constituée à Rome vers 1820

par Giovanni Liberotti et composée de plus de quatre cents pièces. Ils reproduisent une sélection d'architectures et d'œuvres d'art célèbres, de l'Antiquité au début du XIXe siècle, exposées dans des musées et des collections privées de Rome, Florence, Milan et Paris. Placés dans des coffrets en bois facilement transportables et légendés, les camées en plâtre étaient l'un des souvenirs les plus recherchés par les voyageurs et les amateurs d'art de toute l'Europe, qui pouvaient ainsi préserver le souvenir de leur Grand Tour en Italie. En les observant attentivement, on découvre de nombreuses statues antiques conservées à Rome et plusieurs œuvres de Thorvaldsen et Canova, les deux plus grands sculpteurs de l'époque néoclassique...
etc.etc.







L'ameublement du début XIXe vous connaissez. Je ne vais pas rallonger cet article avec encore des photos.  Mais plutôt partager avec vous cette très belle vierge à l'enfant.

"La Vierge à l'Enfant avec saint Jean enfant
Cette peinture sur panneau de bois est une œuvre typique de dévotion privée, peut- être une tapisserie de tête de lit ou un petit autel portatif réalisé pour la demeure d'une riche famille. Le schéma à trois personnages fait référence à un type de composition inventé à Florence dans la seconde moitié du XVe siècle qui, par la suite, s'est largement répandu au centre de l'Italie. La référence la plus immédiate est Pietro Vannucci dit « Pérugin », qui comme son surnom l'indique travaillait entre Pérouse, Florence et Rome durant le XVe et le XVIe siècle. Le grand succès du peintre et de son atelier - dont l'élève le plus célèbre n'est autre que Raphaël - en fait l'un des principaux représentants de la peinture italienne de la Renaissance. Dans cette œuvre, la relation avec la peinture du « Pérugin » est évidente en raison de la physionomie unique de la Vierge, l'aspect gracieux et rond de Jésus et de saint Jean- Baptiste enfant, l'équilibre de la composition, la lumière claire et les couleurs nettes. D'autres détails confirment la proximité du « Pérugin » comme le vent qui fait bouger le ruban de la coiffure de Marie et la chevelure de saint Jean-Baptiste. À l'heure actuelle, il est impossible d'affirmer avec certitude qui en est l'auteur. Cependant, il s'agit très probablement d'un étudiant ou d'un adepte du « Pérugin » vivant dans la région des Marches au début du XVIe siècle."

Il était presque 14h00 lorsque nous sommes sortis de la villa, des chefs-d'œuvre pleins les yeux, et nous n'étions pas vraiment enclin à retourner visiter une autre villa notamment celle prévue, Monastero à Varenne, nous approchions de la saturation et puis nos estomacs ont gargouillés...

Alors nous avons décidé de partir plus tôt et de faire escale sur la riviera italienne, je voulais aussi m'arrêter en route dans quelques boutiques et supermarchés susceptibles de vendre cette variété de tisane de la marque - italienne certo ! - Pompadour, "Cacao Arancia con canapa" sfortunatamente, je ne l'ai jamais trouvé !

Fin du voyage italien.
 A + !
TO THE HAPPY FEW



Comme toujours l'écriture en italique et de cette couleur indique la retranscription d'un cartel, d'une explication donnée près de l'œuvre ou bien d'un extrait de livre d'un auteur mais certainement pas de moi.

mercredi 30 avril 2025

L'ANECDOTE. SUR LE POINT D'ECRIRE UNE LETTRE.

Alors. Le billet est certes un peu long. Mais c'est vrai que mes articles les plus longs sont les plus lus, mais rien ne vous y oblige. 

L'anecdote. Au cours d'une visite, d'un voyage, dans un livre, un film il y a toujours quelque chose qui saute aux yeux, un petit quelque chose qui vous interpelle, une ambiance, un parfum fugace ou bien encore un détail,  anecdotique certes, mais qui restera une émotion, point d'ancrage dans votre mémoire en rapport avec le lieu, cette œuvre ou même cette personne. Et ce petit rien, cette anecdote se déniche partout, au détour d'une ruelle à Barcelone (Lien), ou dans une riche villa comme la villa Ephrussi de Rothschild (Lien), ou même dans une chapelle si magnifique soit-elle comme la Sainte-Chapelle. Ou dans un improbable ailleurs.


Jack B. Yeats 
Londres 1871-1957 Dublin
A propos d'écrire une lettre ou peut-être mieux traduit : Sur le point d'écrire une lettre
1935
Huile sur toile
Une grande partie de l'œuvre artistique de Yeats des années 1930 fait écho à ses propres efforts littéraires. Ce sujet est tiré d'un recueil de poèmes du XIXe siècle intitulé The Fancy, écrit par John Hamilton Reynolds sous le pseudonyme de Peter Corcoran. Dans le livre, un jeune homme se retrouve déchiré entre l'amour de sa fiancée et l'attrait d'un style de vie capricieux. "The Fancy" était un terme collectif appliqué au XIXe siècle à la boxe, un sport pour lequel Yeats avait un intérêt particulier.
Acheté en 1964 (Shaw Fund), NGI.1766

"About to Write a Letter" Cette lettre, anecdotique dans le tableau m'appelle. Oui ce tableau m'a tout de suite interpelé, déjà par l'opposition marquée des couleurs, ce rouge vermillon de la nappe versus le vert de la tapisserie mais aussi par le fort contraste des tonalités entre le visage blafard de l'homme et son costume noir, aussi l'ombre totale qui masque le sol. Si élégant soit-il l'homme est lugubre. Il se dégage de cette peinture une curieuse ambiance, Anecdotique 
Certes car perdue au milieu de toutes les peintures de la National Gallery of Dublin. Anecdotique oui c'est le mot, alors, le tableau m'intrigue. 
Je cherche la lettre, elle est là posée sur la table, on ne sait si la page est blanche - le trait du pinceau de l'artiste est expéditif - je la suppose encore vierge: la plume semble être sur le porte-plume et le titre de l'œuvre n'est-il pas Sur le point d'écrire une lettre ?

Je m'interroge : Pourquoi ce personnage (que je vais appeler Peter parce que vous ne pensez pas que je vais à chaque fois taper personnage) pourquoi Peter est-il debout ? Je ne crois pas qu'il va écrire sa liste de courses (il se dirige voir ce qui reste dans son frigo) non.

Non. Cherche-t-il l'inspiration ? je ne pense pas, d'ailleurs ne regarde t-il pas cette lettre fixement ? le tableau date de 1935, et à l'heure où vous me lisez, il la regarde toujours, hum donc non.

A bien y regarder, il est en mouvement, plus que des mouvements d'un tai-chi quotidien, je pense plutôt que Peter fait les cent pas,
 Il réfléchit, ça l'énerve, 
Il en a poussé violemment son fauteuil en bas à gauche pour éviter tout obstacle gênant,
être face à face avec cette lettre.
Debout,
Comme pour un duel , c'est une affaire entre elle et lui.
C'eût pu être l'attitude tant relatée de l'écrivain hésitant, en manque d'imagination devant la page blanche mais en fait c'est pire, il cherche une manière efficace de réponse dans ce duel: l'angle d'attaque,  nous sommes au début du combat.

L'atmosphère est tout aussi dramatique que la face pâle (aussi pâle quand j'y pense que les gaufres de mon gaufrier un peu lent à chauffer alors forcément quand j'ouvre j'ai deux gaufres pâlottes, oups là je digresse) la face pâle de Peter est tragique et cette lumière du jour masquée par l'opacité des rideaux rouges, retient mon attention, cette obscure clarté comme disait Corneille n'instille aucune joyeuse humeur mais indique plutôt la volonté du peintre de placer Peter dans un environnement très intime, solennel. Tirés les rideaux, fermée la porte, éteintes les bougies et la télé: Peter veut focaliser toute son attention sur cette fichue lettre qu'il n'arrive pas à attaquer (c'est le mot). L'heure semble grave, il fallait composer.

Sur ces très intelligentes mais vaines analyses, je me suis dit qu'il fallait donc que je lise "The Fancy", écrit par John Hamilton Reynolds alias Peter Corcoran, puisque le sujet, dit le cartel du tableau, en était tiré. 
Lire "The Fancy". (Ah mince pas d'édition française flute.) Lire "The Fancy" ne m'était pas très emballant mais une fois plongé dedans et accepté le thème et le format - m'être résigné en somme - j'ai trouvé - moi qui ne suis aucunement littéraire - la lecture comme assez curieuse.

Deux maisons d'éditions ont imprimé ce bouquin l'une, Taylor & Hessey en 1820 dans lequel John Hamilton Reynols écrit sous le pseudonyme de Peter Corcoran

The Fancy, a selection from the poetical remains of the late Peter Corcoran of Gray's Inn, student at law with a brief memoir of his life.


La seconde, Elkin Mathew en 1821, où John Hamilton Reynols est cité comme étant l'auteur:

The Fancy By John Hamilton Reynolds With a Prefatory Memoir and Notes by John Masefield And Thirteen Illustrations by Jack B. Yeats


Cette seconde version est illustrée par notre peintre Yeats ! J'y plonge. D'ailleurs la première illustration m'encourage: voilà Peter Corcoran en train d'écrire bon ok il est au lit et non dans une posture aussi combative que dans le tableau mais tout de même ça m'encourage.

John Hamilton Reynolds est un écrivain du début XIXe à Londres. Il écrit dans des journaux et publie des recueils de poèmes (Le Jardin de Florence). Ce qui est notable c'est qu'il est l'ami de John Keats. The Fancy, traduisez une envie, un caprice, une fantaisie, mais je préfère la définition de l'écrivain : Fancy est un terme pour toutes les canailleries. Là, The Fancy est la boxe.

À l'époque, la boxe était un sport populaire en Angleterre, bien qu'illégal. Les combats attiraient des spectateurs de toutes classes sociales et de nombreux ouvrages lui sont consacré comme “Boxiana” ou bien  "Tom Crib's Memorial to Congress" c'est donc dans ce contexte que Reynolds écrit “The Fancy”. 

Moi qui ai dans ma jeunesse davantage étudié le tableau périodique de Mendeleïev que la littérature (et surtout anglaise !), je n'ai pas la lumière à tous les étages dans ce domaine et je dois vous dire qu'en plongeant mon nez dans ce livre ce n'est pas un sentiment d'exaltation qui a soufflé les brumes de mon cerveau mais à défaut de le comprendre pleinement, il m'a bien amusé. The Fancy est un assemblage curieux de pièces burlesques, comiques, lyriques et de poèmes sérieux (ironiques ?) toutes à la gloire de la boxe: en un mot: extravagant.  Malgré la beauté de certains poèmes, on n'en est pas loin de penser qu'il s'agit d'une œuvre satirique à l'égard de la littérature pugilistique qui faisait flores à cette époque.

Mais tout de même : la curiosité aidant, j'avais mis donc le nez dedans, je me devais d'aller jusqu'au bout de mon enquête : de quel sujet Peter allait écrire sur cette page blanche ? 
Je ne sais pas vous mais moi,  j'attaque un livre par le 1er chapitre : je saute la préface quitte à y revenir ensuite si le livre m'a plu. Je dis ça car j'y reviendrais.

Le livre commence par une espèce d'opéra burlesque 
" KING TIMS THE FIRST: AN AMERICAN TRAGEDY.  "
L’intrigue de la pièce: Tims, ancien boucher anglais, avait emmené sa femme, son fils et un entrepreneur de pompes funèbres nommé Hatband dans une colonie isolée de l’Illinois, où M. Jenkinsop, en faillite, sa femme et sa fille Jemima les rejoints. ça commence par Jemima qui désire un homme, "même indien"
Humour absurbe et gras:
"Je suis amoureuse, mais je n'ai pas
d'amant pour moi ;
Si les sauvages n'étaient pas
assez sauvages pour ne pas me courtiser !
À moins d'être mariée, je ne peux pas être
heureuse épouse ou veuve. L'un ou l'autre m'est égal !
Tol de deriddle lido !
Tol de rol, etc.
J'ai un pédé ici,
Oui, et un bien vilain...etc.etc."

Elle jette ensuite son dévolu sur le fils Anthony Tims . Discours romantiques mais pompeux.
On apprend que celui-ci s’était délecté des combats de chiens, des combats de taureaux, de la boxe. Le Père Tims (devenu Le Roi Tims 1er, ne me demandez pas pourquoi, je n'ai pas compris, j'ai dû loupé quelque chose) et Jenkinsop, pensant qu’ils se trompent mutuellement, entament des relations amoureuses illicites chacun avec la femme de l’autre. A la fin, le Roi Tims découvrant l’infidélité de sa femme, assassine Jenkinsop ainsi que les deux femmes et se suicide. 

Humour grotesque :
Reine Tims: 
Nous avons faim, s’il vous plaît à Votre Majesté ; et boire ne nous rendra jamais moins affamés, à notre avis !
Roi Tims: 
Venez à notre droite, Reine ; Hatband, approchez-vous. Parlez, Mme Tims ; ouvre ton mug*, ma chère ; Les bouches ici sont faites pour parler, et non pour manger. Nous ne nous asseyons pas, car nous n’avons pas de siège.
* mug: bouche.
Humour macabre :
Le Roi:
Mes yeux se troublent, la lumière dansante meurt, baisse la lumière ; Madame, bonne
nuit ! [le roi meurt.]
Jenkinsop: 
Il est parti, comme certains meurent dans la boue ! Il est pour une charrette de viande froide *, et moi aussi : Sortez, bande de chats ! Vous nous avez manipulés ! [Jenkinsop meurt.] 
[La Reine et Mme Jenkinsop se prennent la main et s'allongent près de leurs époux respectifs.]
*Une charrette de viande froide, un corbillard."


Je n'irais pas plus dans les détails et pourtant il y aurait beaucoup à dire excepté , excepté ! Ce qui m'intéresse: aucune relation avec le tableau "Sur le point d'écrire une lettre"

Après cette pièce loufoque, s'en vient un long poème de 53 strophes 
"LES CHAMPS DE TOTHILL : UN FRAGMENT."
Là, je dois avouer encore que je n'y ai tout compris à part considérer ces strophes comme une description de sa situation de pauvre poète, admirateur de la boxe, et autres combats des chiens, ours et blaireaux, l'auteur explique le titre:
Ces champs de Tothill sont, pour les connaisseurs, généralement connus sous le nom de Tothill Downs. C'est quelque chose de plus romantique ... 
... C'est là que se sont déroulées d'anciennes batailles d'appel: c'est Tothill Fields.

présente son héroïne Bessy ("au mieux"):
Mon héroïne s'appelle au mieux Bessy, une créature très rieuse et rosée. Le nom plus romantique de Rose ou Jessy était dû, sans aucun doute, à sa douce nature. Ses cheveux sont ce que l'école cockney appelle des tresses ...

et lorsqu'il a fait le tour de ce qu'il avait à dire nous quitte:
Je vais donc m'arrêter à l'écurie de Fancy,
où Pégase est amené à appâter ...  Il est assez tard : demain après le petit-déjeuner, vers dix heures,
comme dit Macheath, je reprendrai la route.

Dans le site internet de Exclassic ce long poème est  résumé à ceci : "un fragment épique en ottava rima, intitulé The Fields of Tothill, dans lequel l’auteur divague à la manière byronienne et s’arrête, fatigué de sa tâche, avant d’avoir commencé à peser son histoire".

Je passe aussi cette partie donc car je n'y n'ai trouvé trace de "la lettre de Peter".


Vient ensuite une série de 10 poèmes. Autour de la boxe évidemment, et le premier réapparait un prénom déjà lu dans le long poème de Tothill précédent :  Kate

Strophes à Kate,
lorsqu'il comparaît fortuitement devant elle 

« Un œil au beurre noir lors d'une récente bagarre,
« Car parfois, il faut boxer sans masque. »
DON JUAN.

Tout puni et repentant, à genoux,
je m'incline devant toi, Kate, pour éviter un adieu :
Oh, que tes yeux, mon amour, ne me regardent pas d'un air noir,
car les miens sont forcés de te regarder d'un air noir.
Suis-je pire à tes yeux, parce que je suis pire à mes propres yeux ?
Les femmes doivent-elles punir, tout comme les hommes ?
Je pensais que tu aurais apporté, quand tu m'as trouvé
seul,
Opodeldoc et des sourires, pour me remettre sur pied.

L'opodeldoc est un liniment médical pour soigner les coups, on comprend ici que l'homme rencontre sa dulcinée au sortir d'un combat et qu'il a les yeux au beurre noir: aveu irrécusable qu'il boxe mais rien au sujet d'échange épistolaire entre Peter et Kate. 

Bref, j'arrive au bout du livre et je suis un peu dans cette position ci-dessous :je n'ai rien à rapprocher au tableau de Jack B. Yeats.

Il me reste à lire l'introduction de Masefield et la préface de Reynolds, je commence par cette dernière, on ne sait jamais elle peut me mettre sur la voie.

La préface est écrite par l'auteur J.H. Reynolds sous le pseudonyme de Peter Corcoran. (Peter Corcoran est aussi le nom d'un boxeur reconnu, mort avant que Reynolds ne naisse) 
J.H. Reynolds dans cette préface va nous raconter la vie de son Peter Corcoran jusqu'à sa mort, son Peter Corcoran à lui, étudiant en droit, personnage imaginaire donc mais inspiré de sa propre vie: il le fait naître à la même date et au même lieu que lui-même mais ne le fait pas mourir à la même date (il y met de l'humour, moi aussi). Je ne vais pas vous faire un résumé de cette biographie, il y met de l'humour, disais-je,
"Shrewsbury, une ville peu réputée pour ses hommes de talent ou de génie, mais proverbiale pour l'orgueil et l'arrogance de ses habitants et pour l'excellence de ses gâteaux."
Juste vous dire qu'il était donc amoureux d'une femme (dont il a transposé le prénom en Kate dans son bouquin). Mais en tombant par hasard sur un combat de boxe,  il se passionne pour the fancy - la boxe - et délaisse sa belle. Celle-ci le quitte et lui, rongé de remords, essaie de la reconquérir d'où arrivent des échanges de lettres ! Ah ! lettres ! ah ! pétard ! enfin la lumière dans ce long tunnel !

Dans cette préface J.H. Reynolds fait écrire à Corcoran une lettre à Kate que voici :

Traduction google qui je suis sûr manque de perfection
« MA CHÈRE KATE, » Je vous assure que je ne mens pas quand je dis que je regrette que ma dernière lettre vous ait été si sévère. Vous avez cependant riposté avec brio. Vous avez frappé mes jambes de pugiliste, fait perdre pied, vous m'avez plié en deux, ma lettre et moi, d'un seul coup, et vous m'avez littéralement terrassé.
 Et bien que (comme cela peut servir à le démontrer) vous ne m'ayez pas complètement « défait», vous voyez que je me remets au travail avec beaucoup de langueur ; et ce sera probablement le dernier round où je me présenterai devant vous dans une attitude de mouvement. Vous êtes trop forte pour moi. Je ne suis qu'un poids léger, et vous avez trop de gravité. Mes ralliements ne servent à rien. Si je porte un bon coup, cela ne se répercute pas sur vous. Vous êtes trop bien défendue. Je gaspille mon esprit et mon souffle en vain : si j’essaie de planter un crochet sur vos côtes qui vous fera trembler les flancs, vous vous moquez de moi, au lieu de vous moquer avec moi ; et finalement, vous m'avez envoyé une lettre par la poste qui me fend la mâchoire et me fait tomber. Impossible de tenir tête à un client du rhum* tel que vous. Je me garderai donc désormais d'un tel châtiment.
« Hélas, pauvre Fancy ! Si ses fleurs rencontrent un accueil aussi glacial dans le voisinage de sa propre Moulsey, elle pourrait tout aussi bien (comme le crocodile de Lord Castlereagh) mettre ses mains dans les poches de sa culotte, ou les utiliser à d'autres fins, plutôt que de les serrer en poings. Elle ferait mieux de découper immédiatement ses gants en mitaines et de passer ses doigts dans des bagues, au lieu d'y aller elle-même. »
* "client du rhum" : Un adversaire coriace duquel il faut encaisser une raclée ou en donner une.

Voyez-vous toutes ces expressions liées à la boxe ? riposté avec brio - dernier round - poids léger etc. etc... C'est exactement comme j'ai ressenti l'atmosphère en regardant ce tableau et scruter l'attitude du personnage ce qui rejoint mes premières pensées du début:
Il réfléchit, ça l'énerve, 
Il en a poussé violemment son fauteuil (en bas à gauche) pour éviter tout obstacle gênant,
 être face à face avec cette lettre.
Debout,
Comme pour un duel, c'est une affaire entre elle et lui.

Oui, il y a beaucoup à lire et je ne vous en veux pas si vous avez lu en diagonal. Juste à rajouter que cette littérature anglaise a été traduite par google et que donc toute la beauté, la poésie qui aurait dû en émaner se sont malheureusement estompées. 

A + !

M'ont bien aidé:


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L'anecdote  Le Modeste Petit Tableau

L'anecdote Barcelone El mundo nace en cada beso, El món neix en cada besada, Le monde naît dans chaque baiser.