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mardi 22 décembre 2020

Cheverny pour moi

Juste une petite intro pour l'histoire:

Exceptée la période 1537 - 1564, ou la famille Hurault sera expropriée du château, pour être attribuée à Pierre puis à Bernard de Ruthie, et enfin à Diane de Poitiers,Le château reste dans les mains de cette famille depuis plus de 6 siècles. Et ça continue.

Voilà ça c'est fait.

Voici quelques photos de ma visite. Pour la même raison que  à Chambord  puis à Blois et à Chenonceau. Pour moi, les conserver quelque part. 

Je n'ai hélas pas trouvé de roman historique pour vous balader le temps de regarder ces photos et qui se rapporterait au château, (histoire du lieu trop simple ?). Pourtant le site en vaut la peine: il est magnifique.













Oui, je n'ai trouvé aucun roman qui se situerait dans le château. Excepté Tintin qui, plusieurs fois y est allé car, parait-il, Hergé s'est inspiré de Cheverny pour son château de Moulinsart. 

Hergé a retirer les ailes mais la disposition des fenêtres et œil de bœuf est identique.

Tintin que j'avais déjà rencontré là, à St Nazaire.

A + !



mardi 15 décembre 2020

Chenonceau. Pour moi.

 Tout comme mon billet sur Chambord (là) et Blois (ici) , je viens coller quelques photos prises lors de ma visite à Chenonceau. Malheureusement, une fausse manip m'a fait perdre la plupart alors

 Pour le reste

Pour ne pas les avoir prises en vain.

Pour ne pas aussi les perdre.

Pour moi.

Le Château de Chenonceau (sans x à la fin, c'est le village à coté, Chenonceaux, qui l'a gardé pour lui) est souvent nommé le Château des Dames, et je ne veux pas raconter l'Histoire de France, vous trouverez moult articles bien ficelés sur ce sujet dans le net, mais  comme j'ai énuméré les Grands Hommes passés à Blois, je me vois le plaisir de citer quelques unes de ces dames.

Avant le château, il y avait un château. Plutôt un fort médiéval celui-ci, carré avec 4 tours aux coins, comme celui que je fais toujours à la plage avec ma petite pelle et mon seau bleu. Il appartenait à Pierre Marques (le château, pas le seau). Après bien des micmacs de Thomas Bohier,  le château fut confisqué à la faveur de ce dernier.

Première de ces dames: Katherine Briçonnet, épouse de Thomas Bohier, (Notaire et secrétaire du roi en 1491, chambellan de Charles VIII, maître des comptes à Paris, etc. etc.. Il est au service de Louis XI, Charles VIII et Louis XII, et enfin de François Ier. En fait il n'a pas trop de temps alors il fait raser la forteresse en ne gardant qu'une tour pour reconstruire et c'est Katherine qui s'y colle pour superviser la reconstruction avec succés: ainsi né le Château de Chenonceau.

Puis Diane de Poitiers, Henry II dont elle est la maitresse lui donne le château (Il semble qu'il tient bien à elle, et soit bien sous son influence: Rabelais, méfiant, dira ""le roi avait pendu toutes les cloches du royaume au col de sa jument".

Diane ajoutera le pont sur la rivière le Cher (eh oui voici un château de la Loire sur le Cher) pour relier l'autre rive.

Ensuite Catherine de Medicis, l'épouse délaissée du même Henri II, qui, aussitôt veuve, déloge bien sûr ! Diane en lui donnant le château de Chaumont. Elle ajoutera sur le pont deux galeries superposées formant un superbe espace de réception, et donnant ainsi au château son aspect actuel. Pour évoquer la grandeur de ces deux galeries, pendant la première guerre mondiale, Gaston Menier, le propriétaire  y installera un hôpital militaire avec cent-vingt lits, un bloc opératoire, etc.

Après Louise de Lorraine, épouse du roi Henri III, qui héritera du château de Catherine de Médicis, sa belle-mère.

Et puis 

Louise Dupin,

Marguerite Pelouze, 

Marie de Luxembourg, Duchesse de Mercœur

Et j'en passe, toutes auront à cœur d'embellir, de rénover, de magnifier ce château. 

Pour en savoir plus, visiter Wiki qui a un bel article sur le château .

Maintenant mes photos ! Accompagnées cette fois-ci d'un texte de Flaubert: "Par les champs et les grèves". Lui seul sait décrire avec beaucoup de charmes, voyez comment il commence: "Je ne sais quoi d'une suave singulière et d'une aristocratique sérénité transpire du château de Chenonceau." Voilà ! en quelques mots il a planté le décor, l'ambiance. Je vous laisse suivre la suite.

"Je ne sais quoi d'une suave singulière et d'une aristocratique sérénité transpire du château de Chenonceau. Il est à quelque distance du village qui se tient à l'écart respectueusement. On le voit, au fond d'une grande allèe d'arbres, entouré de bois encadré dans un vaste parc à belles pelouses.



Bâti sur l'eau, en l'air, il lève ses tourelles, ses cheminées carrées, Le Cher passe dessous, et murmure en bas de ses arches dont les arêtes pointues brisent le courant. C'est paisible et doux, élégant et robuste. son calme n'a rien d'ennuyeux et sa mélancolie n'a pas d'amertume."






J'aime le style de Gustave ! c'est simple mais chaque mot est employé à bon escient : 'C'est paisible et doux, élégant et robuste. son calme n'a rien d'ennuyeux et sa mélancolie n'a pas d'amertume.' en deux phrase, on respire l'atmosphère de l'endroit.

"On entre par le bout d'une longue salle voutée en ogive qui servait autrefois de salles d'armes.


On y a mis quelques armures qui, malgré la nécessité de semblables ajustements, ne choquent pas et semblent à leur place. Tout l'intérieur est entendu avec goût. les tentures et les ameublements de l'époque sont conservés et soignés avec intelligence. Les grandes et vénérables cheminées du XVI -ème siècle ne recèlent pas, sous leur manteau, les ignobles et économiques cheminées à la prussienne qui savent se nicher sous de moins
grandes.


Dans les cuisines que nous visitâmes également, et qui sont contenues dans une arche du château, une servante épluchait des légumes, un marmiton lavait des assiettes, et debout aux fourneaux, le cuisinier faisait bouillir pour le déjeuner un nombre raisonnable de casseroles luisantes. Tout cela est bien, a un bon air, sent son honnête vie de château, sa paresseuse et existence d'homme bien né. J'aime les propriétaires de Chenonceau.



La princesse de Rohan.
Jean-Marc Nattier
Paris 1685-1766



N'y a-t-il pas, d'ailleurs, partout de bons vieux portraits à vous faire passer devant un temps infini, en vous figurant le temps où leurs maîtres vivaient,



et les ballets où tournaient les vertugadins de toutes ces belles dames roses, et les bons coups d'épée que ces gentilshommes s'allongeaient avec leurs rapières? Voilà des tentations de l'histoire. On voudrait savoir si ces gens-là ont aimé comme nous et les différences qu'il y avait entre leurs passions et le nôtres. 

On voudrait que leurs lèvres s'ouvrissent, pour dire les récits de leur cœur tout ce qu'ils ont fait autrefois, même de futile, quelles furent leurs angoisses et leur voluptés...








...Nous lui avons cependant dit adieu à ce pauvre Chenonceaux ; nous l’avons laissé avec ses beaux souvenirs, ses beaux portraits, ses belles armures et ses vieux meubles, dormant au bruit de sa rivière roucoulante, à l’ombre de ces grands arbres, sur son herbe verte ; et pleins de bonne humeur et les gourdes remplies, nous avons fait l’inauguration de nos sacs en allant à pied gagner Bléré pour de là nous rendre à Tours.

« Pax Tibi Marce Evangelista meus »

La paix est avec vous mon cher évangéliste

...Nous lui avons cependant dit adieu à ce pauvre Chenonceaux ; nous l’avons laissé avec ses beaux souvenirs, ses beaux portraits, ses belles armures et ses vieux meubles, dormant au bruit de sa rivière roucoulante, à l’ombre de ces grands arbres, sur son herbe verte ; et pleins de bonne humeur et les gourdes remplies, nous avons fait l’inauguration de nos sacs en allant à pied gagner Bléré pour de là nous rendre à Tours.

A + !

mardi 8 décembre 2020

Allez savoir pourquoi il y a des gens

 Allez savoir pourquoi il y a des gens qui vous revienne en mémoire.

Il y a des gens dont vous n'avez plus de nouvelles parce que vos routes se sont séparés et chacun, la tête dans le guidon, a pédalé sans en faire grand cas, ou bien la route de ces gens s'est brutalement  interrompue.

Allez savoir pourquoi il y a des gens qui vous revienne en mémoire à des périodes précises, souvent là où la route s'est arrêtée. Et moi, j'aimerais qu'il en reste quelque chose, un soupçon de souvenir saupoudré là dans le tumulte du net. 




Najib

Il m’attendait toujours sur l’avenue bruyante, surchargée de camions, qui borde la cité. Son imposante stature s’était plantée là, sur le trottoir, immobile, insensible à la pollution routière.

Najib était comme on dit « un homme enveloppé »,  il ne l’avait pas toujours été. Jeune, il visitait régulièrement une salle d’haltérophilie et était musclé,  m’avait-il dit. Mais maintenant son corps subissait les méfaits de son alimentation déséquilibrée et peut-être de ses gènes; il avait un visage aux traits grossiers, fendu d’un large sourire flasque qui reflétait pourtant une véritable bonté. Des mains de catcheur qu’on hésitait à serrer, ce qui n’était plus mon cas: passée notre première entrevue, Najib m’embrassait maintenant comme on embrasse un cousin.
Mais que fallait-il craindre le plus de la main ou de l’étreinte de ses bras énormes qui vous aplatissaient contre son torse ? j'avais l'impression d'être une peluche à qui l'on faisait un câlin.

Il monta dans la voiture et, bien avant de fermer la portière, me répétait en criant dans l’oreille : PHILIPPE !!!! SALAMALEKUM !!!! ça va ? vite démarre, DEMARRE !! met le signal (pour lui, le clignotant : il n’avait pas le permis de conduire) !! là, DROITE, gauche au feu !! la famille ça va ?  STOP c’est rouge, c’est bien… VERT !! et le fils ça va ? Ton président qu’est-ce qu’il fait, c’est bien qu’est ce qu’il fait, etc.
Pas la peine pour l’instant de tenter de répondre … juste acquiescer… sourire… et puis éclater de rire : vous aviez oublié ?! Bienvenue à Mohammedia !
Le flot de paroles emplit, remplit la voiture: des conseils de conduite avec les mains obstruent le pare-brise, des questions mielleuses sur la famille, la santé, les nouvelles du Maroc se répandent doucement entre les sièges, mêlées à d’illogiques commentaires politiques comme seul lui peut en émettre, et encore des indications autoritaires sur le parcours que nous connaissons pourtant par cœur, sont projetés à gauche, à droite, accompagnés de gestes de ses gros bras qui vous encombrent la vision, débordent par-dessus la vitre baissée.
Tandis que ses élans inondent l’atmosphère de la voiture, me brouille l’esprit et finissent par me faire rire, une pensée surgit : le trajet est court : Pourrais-je rouler 100 km avec lui ?

Dans la raffinerie, Najib connaissait tout le monde, du directeur au moindre stagiaire, et, de l’entrée à la salle de contrôle, les quelques centaines de mètres à marcher,  duraient une heure, on s’appelle, on s’apostrophe, on s’embrasse, on me présente puis on repart, 10 fois, 20 fois ou peut-être plus encore …c’est d’autant plus pénible que je sais déjà qu’au retour, les équipes de travail auront permutées et que tout sera refait à l’envers : de la salle de contrôle jusqu’à l’entrée de l’usine, on s’appellera, on s’apostrophera…
Le travail achevé, sur la route du retour, c’est le calme, on s’arrête pour déjeuner si c’est midi, toujours dans les même snacks du port : salade de tomates et oignons rouges puis des limandes frites, si imbibées d’huile qu’il vaut mieux les plaquer sur la nappe en papier pour en éliminer une partie et retirer la panure avec les doigts. Mais il en reste encore beaucoup, toute cette huile de friture.

Là, Najib est plus placide quand il mange. L’huile ne lui fait pas peur, il ne mange pas il dévore,  ramasse la  « panure-éponge d’huile » que j’ai boudé en me disant T’en veux pas ?
Toute cette huile de friture.
Toute cette huile de friture.
Alors je m’enquiers seulement maintenant de lui, de sa famille, ses enfants, leur santé à chacun, a-t-il terminé sa maison ? Mais je sais bien qu’il ne la terminera jamais, comme la plupart des gens d’ici. Sa maison.

Najib avait fait construire sa maison, pas dans la Médina, non, mais dans la grande cité du sud qui se répandait et avec elle des milliers de sachets et autres bouteilles plastiques que tout le monde jetait sans égard. Les papiers et cartons eux étaient récupérés par ces hommes qui les amassaient dans des charrettes tirés par des ânes.

La principale avenue était goudronnée, les rues qui la bordaient non. Pas encore (le seront-elles un jour ?) mais quand même des trottoirs.
Et puis plus loin encore de la grande avenue, juste du sable sans trottoir.
Et partout des plastiques, des enfants qui courent, crient et rient autour des vieillards immobiles, le corps recouvert d’une djellaba grise ou brune de berger, accroupis comme eux seuls savent le faire, à l’ombre des bâtiments, accroupis là comme leurs pères les bergers, et les pères de leurs pères…

La maison n’était pas très grande mais très propre,  la porte d’entrée donne sur un vestibule, de l’escalier à gauche, bizarrement on peut voir le ciel.

Najib m’expliqua la première fois que tant que la maison n’était pas terminée, il ne payait pas de taxe et que le deuxième niveau une fois fini serait pour son fils et sa femme, et le troisième si besoin pour sa fille. Pour l’instant, à voir l’état des marches du premier palier, maculées de déjections aviaires, seuls les pigeons étaient locataires des étages. Comme à chaque explication, son sourire se fige, il me dévisage, attendant mon approbation que je m’empresse de lui donner.

Mais que se passait-il quand il pleuvait ? Je n’ai pas posé la question.

Au fond, la cuisine derrière laquelle on devinait l’arrière-cour. A droite un grand salon Marocain avec ses canapés tout le long des trois murs et des tapis partout : Najib frappe sur un canapé, jette des coussins. Viens t’asseoir Philippe. Du  thé ? Sans attendre il part, appelle sa femme, et s’en suit un dialogue en arabe, ponctué de quelques mots français, souvenirs de la colonisation, qui émergent ça et là, gâteaux, France, Marseille…

Je reste seul, et me sens soudain gêné de cet accueil franc, simple. D’où je suis, j’aperçois l’intérieur de la pièce en face : une chambre. Sur des tapis, des matelas et sur ceux-ci des duvets, des couvertures pêle-mêle tout est étalé au ras du sol, partout si bien qu'il n'est pas possible de fermer la porte.  Najib revenu, suivant mon regard, me dira Regarde Philippe, là c’est la chambre des enfants ! Ils ont toujours bien chaud !

La dernière fois que j’y suis revenu c’était pour manger le mouton, la semaine après la fête de l’Aïd. C’est là que Najib m’as dit, Je suis malade, j’ai consulté le médecin il m’a dit : c’est le foie, vous buvez !!  MOI ! BOIRE DE L’ALCOOL !! Jamais j’ai bu !! il m’a donné des médicaments mais y a rien à faire. 

Lors de mes missions suivantes, je n’ai revu Najib qu’une seule fois, assis à son bureau, il était là mais ne travaillait pas, il était très amaigri, c’est moi qui suis venu l’embrasser, qui lui a posé les milles questions qu’il me posait toujours à nos retrouvailles. Mais sans le presser, en attendant patiemment ses réponses, il m’a dit, Philippe, mon foie ça va pas mieux non.

C’est Ahmed qui m’apprit la triste nouvelle quelques mois plus tard.

A + !