Dans l’avion qui
m’emmène de Marseille à Athènes (via Munich, pourquoi faire simple…) j’ai du
temps. Je sors mon agenda.
Tout comme vous, je le sais, j’ai pris la bonne
résolution le mois passé, au moment où j’ai reçu le nouvel agenda de la Boite,
de noter les rendez-vous ( je le faisais déjà dans mon Iphone, mais bon)
et surtout de reporter ce que j’ai à
faire pour combattre la procrastination ;)) délaissant ainsi le bloc de
papier « TO DO » de mon bureau dont le titre ne m’encourageait guère.
Car le lisant à chaque fois en français i.e.
« tout doux », s’insinuait alors la pensée « c’est vrai, n’allons pas
trop vite », me résignant finalement à
le replacer dans le tiroir sans rien n’y avoir écrit.
Je sors,
disais-je, mon agenda. A bas la procrastination !
Je vais lister
les tâches du jour, de la semaine, et même des mois à venir.
L’hôtesse
Lufthanzienne dont les yeux bleus et le corps qui va avec, déradicaliseraient en un seul regard, un djihadiste égaré dans ce vol Munich- Athènes
par manque de moyen pour un Munich- Gaziantep, cette charmante hôtesse donc, me
fait remarquer le hublot : un paysage magnifique de montagnes enneigées
sont à nos pieds. Je partage : joli non ?
La procrastination !
Cette manie de remettre toujours à demain/plus tard ce que l’on n’a pas envie
de faire aujourd’hui, ce qui me parait bien profitable pourtant.
Exemple :
Combien de nuits où soudain éveillé, j’entends les cavalcades furtives des
rongeurs venus pour l’hiver se réchauffer dans les combles et qui s’en
donnent à cœur-joie à gratter et courir au-dessus de ma tête? Et à ce moment
précis, si je ne me disais pas : « demain, dès que j’ai un moment, je remonte là-haut semer quelques souricides appâts ! » est-ce que je ne
m’endormirais aussi vite ? Satisfait au fond de mon lit douillet de ma
décision ; Bienveillante procrastination qui apaise ma conscience et me
permet une rapide plongée dans un bon sommeil…
La Procrastination Positive
selon Philfff.
Mais bon le
problème des souris n’est toujours pas réglé ! Donc, je sors mon agenda. A bas
la procrastination.
D’ailleurs, ce problème
me tient à cœur depuis un moment : j’ai gardé un article (*) de l'International Herald Tribune
sur ce sujet , en gros, Mr John Tierney dit ceci :
Des chercheurs
ont indépendamment identifié le phénomène de la Procrastination Positive :
Préférant parler de « Procrastination
Structurée », se détestant lui-même
pour sa procrastination, il réalise qu’il n’est pas si paresseux que ça, et
rebutant à classer des docs, il ne reste pas pour autant assis les bras croisés.
Il réalise que c’est en fait une question de méthode : En haut de votre
liste « To Do » (à faire), mettre quelques difficiles, voire
impossibles, tâches qui sont vaguement importantes (mais pas vraiment) et
semblent avoir des délais (mais vraiment pas), puis, plus bas sur la liste ,
inclure des tâches réalisables qui importent vraiment.
« Faire ces dernières,
devient une façon de ne pas faire les choses plus haut sur la liste » dit
Perry, " avec ce genre de structure de tâche appropriée, le Procrastinateur devient un citoyen
utile. En effet, il peut même se
targuer de terminer beaucoup de choses.
« le
secret de mon énergie et une incroyable efficacité à obtenir le travail
effectué est simple. Le principe psychologique est le suivant: n’ importe qui
peut faire n’ importe quelle quantité de travail, à condition que ce n’est pas
le travail qu'il est censé faire à ce moment-là. » Personnellement, je
doute un peu de la maturité du principe : reste à définir quel moment correspond
telle tâche, mais l’article ne développe pas assez.
Un stewart, dont les mensurations d’athléte convertirait définitivement à l’athéisme le même djihadiste
fauché, m’apporte le plateau-ptit-dèj. Contrairement à Air France, qui a révisé
les bases de la cuisine Française en volant bas dans la qualité, la compagnie
Allemande, elle, s’est maintenue à la même altitude, mais c’est vrai que sa
qualité gastronomique n’a jamais voler très haut… voyez plutôt. J'ai la chance d'être cette fois-ci en classe affaires. Mon taux de cholestérol m'interdit beaucoup, je négocie avec ma conscience pour avaler la charcuterie. Ah, Je regrette hier et la petite salade d'endives avec un filet d'huile d'olive...
Ou en étais-je ? oui, l'article de Mr Tierney. Il y a aussi Piers Steel:
« Pour
la plupart d'entre nous, la procrastination peut être battue, mais pas entièrement
, mon meilleur truc est de jouer mes projets les uns contre les autres,
temporisant sur l'un en travaillant sur l'autre. Nous sommes prêts à poursuivre
une tâche vile tant qu'elle nous permet d'éviter de faire quelque chose de pire »
Il donne crédit théorique (je cite l’article, notez bien), à Francis Bacon dont
la stratégie de la maîtrise de soi était de «mettre l'affection contre
affection» et de maîtriser l’une par l'autre alors même que nous utilisons pour
la chasse la bête contre la bête.
Hummff, pas
convaincu.
Et tandis que Robert
Benchley construit une bibliothèque (il
aura publié plus de 600 essais), Chandler frappe de nombreux experts comme un
meilleur modèle.
Plus proche de la stratégie Perry. Il décrit la méthode de Baumeister: le « Nothing
Alternative »
Chandler se força à écrire des histoires de détective en restant assis dans
une pièce pendant quatre heures tous les jours et selon deux règles:
- Vous n’avez pas
à écrire .
- Vous ne pouvez pas
faire autre chose.
« l'Alternative Rien »: Suivre les deux règles est impossible, faire autre
chose signifie sortir de la pièce et la stratégie s'arrête là: échec, alors il finissait par transgresser La
Règle 1: il écrivait .
La Luftanzienne
est revenue.
Duty free ? me lance-t-elle – No thanks .
Duty free ? en
feuilletant le catalogue, je suis tombé là-dessus : un crayon avec une
gomme au bout (si, si) et son taille-crayon +
une autre gomme plate dans un etui plaqué-platine
pour la
rondelette
somme de : regardez la photo, oui, oui.
Vous avez bien vu.
Duty
free de quoi ?
Je sors,
disais-je, mon agenda. A bas la procrastination !
Nous n’avons pas
de renseignements sur l’efficacité de la Procrastination Positive et beaucoup de
chercheurs ont des doutes : même quand
vous travaillez, disent-ils, vous gaspillez encore de l'énergie car vous vous
inquiétez, consciemment ou inconsciemment, à propos de la tâche que vous évitez.
Revenons à la
stratégie de Perry.
Perry dit
"la procrastination structurée nécessite une certaine quantité d’auto-tromperie,
parce qu'on perpétue en permanence un
effet de pyramide sur soi-même" effectivement,
en suivant sa liste, les taches du haut ne sont jamais faites, et plus vous descendait,
nombreuses sont les taches effectuées. « La Procrastination Productive est
un maquillage. Vous avez avancé votre montre de cinq minutes, vous savez que
vous l'avez fait, mais vous prétendez que non. »
John Tierney conclut
ainsi : "A tout le moins, vous pouvez l'utiliser (La Procrastination
Positive**) pour cesser de se sentir tellement coupable d'un problème que tout
le monde partage. C’est certainement une stratégie plus saine que le bromure de
ne jamais remettre à demain ce que vous pouvez faire aujourd'hui. Par cette logique, vous ne cesseriez jamais
de travailler - il y a toujours quelque chose qui pourrait être fait demain - mieux
vaut suivre la version réécrite de M. Perry: ne jamais faire aujourd'hui une
tâche qui peut disparaître demain"
On annonce la fin du vol. Descente de l’appareil-remontez le dossier de
votre siège-rangez vos tablettes-etc.
Sur la page de mon agenda, au jour d’aujourd’hui,
il me faut absolument écrire quelque chose, progresser dans ma Procrastination
Positive. Je note entre treize et quatorze heure: Levé 4h00: sieste.
* J'ai retrouvé sur le net l'article cliquez Là
**Note de
Philfff, pour ceux qui suivent à moitié.
A + !